Trib. Jud. Paris, Ord. réf., 8 janvier 2020, RG n°19/58624
En cas d’atteinte à une marque, le titulaire de celle-ci peut solliciter des mesures de blocage d’accès à des sites internet auprès des FAI sur le fondement de l’article 6-I-8 de la LCEN.
L’article 716-6 du Code de la propriété intellectuelle contient les dispositions spéciales organisant la procédure de référé en cas d’atteinte au droit sur une marque. Aux termes de l’ordonnance en référé rendue le 8 janvier 2020, le président du tribunal judiciaire de Paris admet qu’en cas de contrefaçon, le titulaire d’une marque puisse se fonder sur les dispositions de l’article 6-I-8 de la LCEN (Loi pour la confiance dans l’économie numérique) pour solliciter des mesures de blocage d’accès à des sites internet.
La LCEN organise en effet un régime de responsabilité en cascade des éditeurs de site, hébergeurs et des fournisseurs d’accès à internet. L’article 6-I-8 de cette loi prévoit ainsi : « L’autorité judiciaire peut prescrire en référé ou sur requête, à toute personne mentionnée au 2 ou, à défaut, à toute personne mentionnée au 1, toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne » ; les FAI (fournisseurs d’accès internet) peuvent donc se voir contraints de prendre des mesures pour bloquer l’accès à des sites lorsque les démarches auprès des éditeurs et hébergeurs n’ont pas permis de faire cesser les troubles constatés. En l’espèce, des titulaires de marques de luxe dans le domaine de la joaillerie avait constaté la vente de produits manifestement contrefaisants sur plusieurs sites internet. Ceux-ci ne comportaient pas les mentions légales obligatoires et, faute d’avoir pu contacter les éditeurs desdits sites, avaient pris contact avec les hébergeurs pour solliciter qu’ils suppriment l’accès aux sites litigieux. Or, leurs démarches étaient restées vaines. Pour cette raison, le recours au référé prévu par l’article 6-I-8 précité semblait le seul possible pour obtenir des mesures de nature à empêcher l’accès aux sites proposant à la vente des produits contrefaisants.
La décision de référé autorise ce recours alors que l’un des FAI tentait de faire juger qu’en raison de l’existence d’une procédure spéciale de référé-contrefaçon prévue par l’article L.716-6 du Code de la propriété intellectuelle, il n’était pas possible de se fonder sur l’article 6-I-8 de la LCEN. Or, l’ordonnance de référé énonce clairement : « Les demandes de blocage de l’accès à certains noms de domaine faites par les sociétés demanderesses peuvent de ce fait reposer sur le fondement des articles 809 du Code de procédure civile et 6-I-8° de la Loi pour la confiance dans l’économie numérique ».
On se félicitera de cette décision qui va dans le sens d’une meilleure protection contre la contrefaçon en autorisant le recours à des mesures efficaces et radicales.
A rapprocher : Article 6-I-8 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique