CA Bordeaux, 6 juillet 2017, n°17/02837
Si la procédure contradictoire est le principe en matière de contrefaçon, les circonstances, et en particulier l’urgence, peuvent justifier le recours à une procédure non contradictoire pour obtenir des mesures provisoires et faire cesser les actes de contrefaçon.
Ce qu’il faut retenir : Si la procédure contradictoire est le principe en matière de contrefaçon, les circonstances, et en particulier l’urgence, peuvent justifier le recours à une procédure non contradictoire pour obtenir des mesures provisoires et faire cesser les actes de contrefaçon.
Pour approfondir : Une société estimant être victime de contrefaçon de sa marque, avait obtenu sur requête une ordonnance présidentielle l’autorisant à procéder à une saisie contrefaçon au sein d’un hypermarché et à la saisie réelle de deux exemplaires. Dans la foulée, toujours sur requête, elle avait formulé une demande d’interdiction provisoire de fabrication et de commercialisation des produits argués de contrefaçon.
Son action était menée sur le fondement de l’article L.716-6 du Code de la propriété intellectuelle selon lequel : « Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon. La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur. (…) ».
Si le référé-contrefaçon est largement utilisé, il est plus rare que les plaideurs engagent leur action dans le cadre de la procédure sur requête, procédure qui est non contradictoire.
Pourtant, cette voie procédurale ne doit pas être négligée compte tenu de sa rapidité et de son efficacité pour autant que les conditions soient remplies.
La Cour d’appel juge ici : « Il apparaît en l’espèce qu’il existe bien une véritable urgence dans la mesure où nonobstant les opérations de saisie contrefaçon et les éléments qui en résultent, la commercialisation des produits litigieux n’a aucunement été stoppée mais au contraire demeure massive. Si le débat contradictoire est le principe, il apparaît qu’en l’espèce tout retard serait effectivement de nature à causer un préjudice irréparable à l’appelante en ce que devant la juridiction saisie au fond il pourra certes se résoudre en dommages et intérêts mais sans qu’on puisse revenir sur les commercialisations intervenues depuis les opérations de saisie contrefaçon et sur la banalisation du produit qui en résulte.
L’ensemble des pièces versées à l’appui de l’appel justifient d’opérations de commercialisation massives conduisant à une aggravation rapide du préjudice de sorte que l’appelante est effectivement bien fondée à obtenir sur requête une mesure d’arrêt. ».
Le Code de la propriété intellectuelle offre aux victimes de contrefaçon les moyens procéduraux de faire cesser l’atteinte à leurs droits. Si la procédure contradictoire est le principe, les circonstances et en particulier l’urgence peuvent justifier le recours à une procédure non contradictoire. Ce type de procédure conduit à des mesures provisoires et nécessitent que le juge du fond soit saisi pour juger définitivement du litige.
A rapprocher : L.716-6 du Code de la propriété intellectuelle