CA Versailles, 9 octobre 2018, n°18/00572
La notoriété d’une marque est de nature à en renforcer la distinctivité et à aggraver le risque de confusion.
La société Groupe Canal + avait formé une opposition sur la base de la marque Canal +, à l’encontre de la demande d’enregistrement de marque Canal Internet pour désigner des services identiques et similaires en classes 38, 41, 42. Le directeur de l’INPI a rejeté l’opposition formée sur la base de la marque antérieure considérant que le signe contesté Canal Internet ne constituait pas l’imitation de la marque Canal +.
La société Groupe Canal Plus forma donc un recours à l’encontre de cette décision devant la Cour d’appel de Versailles. La Cour reprend en premier lieu les règles constantes d’appréciation de l’existence d’un risque de confusion :
« Considérant que le signe critiqué ne constituant pas la reproduction à l’identique de la marque première qui lui est opposée, il convient de rechercher s’il existe un risque de confusion entre les deux signes, lequel doit s’apprécier globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants ».
Classiquement, la Cour va examiner successivement les ressemblances visuelles phonétiques et conceptuelles entre les signes et retenir que :
- sur le plan visuel, les deux signes ont en commun le terme CANAL en position d’attaque, lequel est d’un caractère dominant, intrinsèquement distinctif au regard des produits et services visés ; qu’au sein du signe contesté, le vocable INTERNET désigne une caractéristique des services, à savoir être diffusés sur le réseau internet, de sorte que ce terme étant dénué de distinctivité, le signe CANAL INTERNET ne forme pas un tout indivisible ;
- sur le plan phonétique, ils partagent la séquence CANAL qui compte deux syllabes identiques, placées dans le même ordre ;
- sur le plan conceptuel, les signes présentent une forte similitude tenant à la reproduction du terme CANAL, qui a la même signification dans les deux signes.
Ces ressemblances caractérisées, la Cour rajoute que la « notoriété d’une marque est de nature à en renforcer la distinctivité et aggraver le risque de confusion ».
En l’espèce, les juges considèrent que la marque Canal + est particulièrement connue auprès du public, ce qui est établie par une étude de l’institut Sofres et que cette notoriété est acquise y compris dans la forme abrégée CANAL.
Cette notoriété renforce le risque de confusion.
Les juges en concluent donc que, compte tenu des similitudes entre les signes en présence et de la connaissance de la marque Canal + sur le marché, il existe un risque d’association dans l’esprit du consommateur moyen normalement informé, raisonnablement attentif et avisé qui n’a gardé en mémoire qu’un souvenir imparfait des deux signes et sera conduit à leur attribuer une origine commune en forme de déclinaison de la marque première.
La décision de l’INPI est donc annulée et l’opposition accueillie.
A rapprocher : Article L.711-4 du Code de la propriété intellectuelle